Une étude sur huit ans a analysé les données de 45.000 personnes. Lorsqu'un participant a augmenté sa consommation de produits ultra-transformés de 10 %, son risque de mortalité s'est aggravé en parallèle de 14 %.
Selon une étude française de très grande ampleur, publiée ce mardi dans la revue médicale américaine « Jama Internal Medicine », il y aurait bien une corrélation entre la consommation de produits ultra-transformés, comme les bonbons, nuggets mais aussi plats préparés, soupes en sachets et tout ce qui contient plusieurs additifs, et un sur-risque de mortalité.
Même si ce lien est pour l'instant « encore très difficile à chiffrer »,avertit d'emblée Mathilde Touvier, la co-auteure et directrice de l'EREN, l'équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle, qui a mené l'étude.
Mais après avoir analysé les données de près de 45.000 Français pendant huit ans, les scientifiques ont observé que lorsqu'un participant a augmenté sa consommation de produits ultra-transformés, en moyenne de 10 %, son risque de mortalité s'est aggravé en parallèle de 14 %. « Le plus important c'est d'avoir montré qu'il y a une association significative et robuste entre les deux facteurs », explique aux « Echos » Mathilde Touvier.
Au total, sur 45.000 participants, un peu plus de 600 décès ont été recensés. Un tiers a été provoqué par des cancers, un autre tiers par des maladies de type diabète et respiratoires, et le reste par des pathologies cardio-vasculaires comme infarctus et AVC. « Nous avons bien sûr aussi pris en compte une série de paramètres pouvant fortement influer sur le risque de mortalité comme le tabac, la pratique sportive, l'alcool etc. », ajoute la directrice de l'EREN.
Plusieurs hypothèses
A propos des produits ultra-transformés, l'étude suggère plusieurs hypothèses concernant le risque qu'ils représentent. La première : leur qualité nutritionnelle plus faible, à cause notamment de la plus forte concentration en sels et sucres ajoutés, ainsi qu'en graisses saturées.
Second postulat : les additifs. En Europe, environ 350 substances sont autorisées. « Mais l'Efsa - l'autorité européenne de sécurité des aliments, NDLR - ne dispose pas d'études sur les effets « cocktails » de ces additifs, chaque évaluation étant faite séparément », révèle la chercheuse. Les mélanges dans les produits ultra-transformés pourraient donc les rendre potentiellement dangereux.
Enfin, les matériaux des contenants peuvent aussi avoir un effet néfaste sur la santé. « C'est le cas de la barquette en plastique que vous mettez à réchauffer au micro-ondes », précise Mathilde Touvier.
Le dilemme des études expérimentales
Cette étude est « un apport important à la littérature », a réagi auprès de l'AFP Casey Rebholz, professeure d'épidémiologie à l'université américaine Johns Hopkins, qui note que la méthodologie est de bonne qualité.
out en reconnaissant les limites inhérentes aux études de ce type. En effet, pour pouvoir établir un lien de causalité formel, il faudrait mener une étude expérimentale, explique Mathilde Touvier. C'est-à-dire faire consommer à un groupe de patients des aliments ultra-transformés, et comparer les données à celles d'un groupe de patients qui n'en auraient pas mangé. « Vous voyez les problèmes éthiques que cela représente », lâche la chercheuse dans un sourire.
Pour l'instant, il faut donc se contenter d'études observationnelles comme celle réalisée par l'EREN. « On espère que d'autres études comme la nôtre vont être réalisées dans d'autres pays pour renforcer le poids de nos observations ».
Source: les Echos